Un chant de Noël
« Esprit, dit Scrooge, avec un intérêt qu’il n’avait jamais éprouvé auparavant, dites-moi si Tiny Tim vivra.
– Je vois une place vacante au coin du pauvre foyer, répondit le spectre, et une béquille sans propriétaire qu’on garde soigneusement. Si mon successeur ne change rien à ces images, l’enfant mourra.
– Non, non, dit Scrooge. Oh ! non, bon esprit ! dites qu’il sera épargné.
– Si mon successeur ne change rien à ces images, qui sont l’avenir, reprit le fantôme, aucun autre de ma race ne le trouvera ici. Eh bien ! après, s’il meurt, il diminuera le superflu de la population. »
Scrooge baissa la tête lorsqu’il entendit l’esprit répéter ses propres paroles, et il se sentit pénétré de douleur et de repentir.
« Homme, fit le spectre, si vous avez un coeur d’homme et non de pierre, cessez d’employer ce jargon odieux jusqu’à ce que vous ayez appris ce que c’est que ce superflu et où il se trouve. Voulez-vous donc décider quels hommes doivent vivre, quels hommes doivent mourir ? Il se peut qu’aux yeux de Dieu vous soyez moins digne de vivre que des millions de créatures semblables à l’enfant de ce pauvre homme. Grand Dieu ! entendre l’insecte sur la feuille déclarer qu’il y a trop d’insectes vivants parmi ses frères affamés dans la poussière ! »
Charles Dickens, Un chant de Noël